Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/47

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

funéraire, et aux étrangers le temps de se rendre à Syracuse pour y assister ; et ses obsèques furent célébrées avec une grande magnificence. Des jeunes gens choisis au sort portèrent le lit funèbre, qu’on avait très-richement paré : ils traversèrent la place où s’élevait autrefois le palais de Denys. Le convoi était accompagné de plusieurs milliers d’hommes et de femmes, tous couronnés de fleurs et vêtus de robes blanches : on eût dit le spectacle d’une fête solennelle. Les cris et les larmes se confondaient avec les louanges du mort ; et ce n’était pas un simple honneur accordé à l’usage, ou un devoir de convention, mais l’expression sincère d’un juste regret, et le pur témoignage d’une affection véritable. À la fin, on déposa le lit sur le bûcher, et Démétrius, celui de tous les hérauts d’alors qui avait la voix la plus forte, prononça le décret du peuple, qui était comme il suit : « Le peuple de Syracuse ordonne que Timoléon de Corinthe, fils de Timodème, soit enterré aux dépens du public, et qu’on emploie pour ses funérailles la somme de deux cents mines[1] ; que, pour honorer sa mémoire, on célèbre à perpétuité, le jour anniversaire de sa mort, des jeux de musique, des combats gymniques et des courses de chevaux, parce qu’il a exterminé les tyrans, défait les Barbares, repeuplé les plus grandes villes, que la guerre avait ruinées, et donné des lois aux Siciliens. »

On lui éleva un tombeau sur la place publique ; et les Syracusains, dans les temps qui suivirent, environnèrent sa sépulture de portiques, de palestres, et d’un gymnase destiné aux exercices de la jeunesse. Ils donnèrent à ce monument le nom de Timoléontium. Pour eux, ils durent au gouvernement et aux lois que Timoléon avait établis, de longues années de paix et de prospérité.

  1. Un peu moins de vingt mille francs de notre monnaie.