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NICIAS.

pelât les Argiens, et qu’on fît avec eux le traité d’alliance. Mais, à cet instant, il survint un tremblement de terre, fort à propos pour Nicias ; et l’assemblée fut rompue.

Le lendemain, le peuple s’assembla de nouveau ; et Nicias fit tant par ses paroles et par ses démarches, qu’il fit décider, quoiqu’à grand’peine, qu’on laisserait en suspens l’affaire des Argiens, et qu’on l’enverrait, lui Nicias, à Lacédémone, assurant qu’ainsi tout irait bien[1]. Il s’en alla donc à Sparte ; les citoyens l’accueillirent avec honneur, comme un homme de bien et qui leur avait donné des preuves de son attachement ; mais, vaincu par l’influence du parti béotien, il ne fit rien, et s’en retourna sans honneur, en mauvais renom, et même peu rassuré sur les sentiments des Athéniens. Ceux-ci se repentaient vivement et s’indignaient de l’avoir cru, et d’avoir rendu tant de prisonniers et de personnages si importants ; car ceux qu’on avait amenés de Pylos étaient tous des premières familles de Sparte, parents et amis des citoyens les plus puissants de cette ville. Cependant la colère ne les porta à rien de fâcheux pour lui, sinon d’élire pour général Alcibiade, de laisser là les Lacédémoniens, et de faire alliance avec les Mantinéens, les Éléens et ceux d’Argos. Puis ils envoyèrent des corsaires à Pylos, pour ravager les terres laconiennes. Et voilà la guerre rallumée.

Or, comme les dissentiments entre Nicias et Alcibiade étaient dans toute leur vivacité, arriva l’époque du bannissement par ostracisme. C’était une coutume chez ce peuple, que de temps en temps un des hommes qui lui portaient le plus d’ombrage, ou qui excitaient l’envie par leur réputation ou leurs richesses, fût banni pour dix ans par la voie de l’ostracisme. Tous les deux ils

  1. Nicias ne fut pas envoyé seul, mais il était le chef de l’ambassade.