Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/387

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cours qu’il prononça devant Pompée, pour réfuter l’opinion d’Hermagoras[1] le rhéteur sur la Question générale. Dans Athènes, Pompée traita les philosophes avec la même générosité qu’à Rhodes, et il fit présent à la ville de cinquante talents[2] pour exécuter des restaurations monumentales.

Il comptait arriver en Italie comblé de gloire, et aussi désiré dans sa maison qu’il désirait lui-même de s’y retrouver. Mais ce démon ennemi qui prend à cœur de mêler toujours aux plus grands biens et aux plus éclatantes faveurs de la Fortune quelque portion de mal, lui préparait depuis longtemps, pour le retour, de cuisants chagrins. Mucia avait tenu depuis son départ une conduite des plus scandaleuses : tant qu’il fut éloigné, il méprisa tous les bruits qui en couraient ; mais, quand il se vit près de l’Italie, et qu’il eut réfléchi à loisir sur les rapports qu’on lui avait faits, il lui envoya l’acte de divorce, sans avoir fait connaître, ni alors, ni depuis, les motifs de cette répudiation ; mais on les trouve dans les lettres de Cicéron.

Des rumeurs de toute sorte avaient précédé son arrivée dans Rome, et y avaient causé un grand trouble, parce qu’on craignait qu’il n’entrât dans la ville avec son armée, et qu’il n’usurpât l’autorité souveraine. Crassus, soit qu’il le craignit réellement, ou, comme il est plus vraisemblable, pour accréditer cette calomnie et aigrir encore l’envie qu’on portait à Pompée, sortit secrètement de Rome avec ses enfants et ses trésors. Mais Pompée, a peine entré en Italie, assembla ses soldats ; et, après un discours fort convenable, pour les remercier de leurs services, il leur ordonna de se disperser chacun dans sa ville, de vaquer à leurs affaires, et de ne pas

  1. Un des disciples de Théophraste.
  2. Environ trois cent mille francs de notre monnaie.