Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/389

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honte, en devenant les alliés de Pompée. » Ces paroles leur firent reconnaître que Caton avait mieux jugé qu’elles ce qu’il convenait de faire.

Quoique le triomphe de Pompée eût été divisé en deux journées, ce temps ne suffit pas pour en étaler toute la magnificence. Une grande partie de ce qu’on avait préparé ne put être exposée aux regards du public ; et il y avait de quoi en embellir et en décorer un second triomphe. La pompe était précédée d’écriteaux portant les noms des nations conquises : c’étaient le Pont, l’Arménie, la Cappadoce, la Paphlagonie, la Médie, la Colchide, les Ibères, les Albaniens, la Syrie, la Cilicie, la Mésopotamie, la Phénicie, la Palestine, la Judée, l’Arabie ; les pirates complètement défaits sur terre et sur mer. On y voyait que Pompée avait pris, dans ces contrées, mille forteresses et environ trois cents villes, enlevé aux pirates huit cents vaisseaux, et repeuplé trente-neuf villes, que leurs habitants avaient abandonnées. Les écriteaux disaient en outre que les revenus publics, qui ne montaient avant Pompée qu’à cinquante millions de drachmes[1], avaient été portés, par ses conquêtes, à quatre-vingt-un millions cinq cent mille drachmes ; qu’il avait versé dans le trésor public, tant en argent monnayé qu’en meubles d’or et d’argent, vingt mille talents[2], sans compter ce qu’il avait donné à ses soldats, dont le moins récompensé avait reçu quinze cents drachmes. Les prisonniers qu’on mena en triomphe étaient, outre les chefs des pirates, le fils de Tigrane, roi d’Arménie, avec sa femme et sa fille ; Zozime, femme du vieux Tigrane ; Aristobule, roi des Juifs ; une sœur et cinq des enfants de Mithridate ; des femmes scythes, des otages des Albaniens, des Ibères et du roi de Comagène. On portait

  1. La drachme valait quelques centimes de moins que noire franc.
  2. Environ cent vingt millions de francs.