Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/434

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avait fait ses premières campagnes sous Pompée, s’approcha de lui : « Qui es-tu, mon ami, lui dit-il, toi qui prépares les obsèques du grand Pompée ? — Son affranchi, répondit Philippe. — Hé bien, reprit le vieillard, tu « n’auras pas seul cet honneur : amené ici par un hasard favorable, je veux m’associer à ce pieux devoir. Je n’aurai pas à me plaindre en tout de mon séjour dans une terre étrangère, puisque j’aurai eu, en retour de tous mes soucis, la consolation de toucher et d’ensevelir de mes mains le corps du plus grand capitaine de Rome. »

Voilà les funérailles qu’on fit à Pompée. Le lendemain, Lucius Lentulus, ignorant ce qui s’était passé, et qui venait de Cypre, rangeant la côte d’Égypte, vit le feu du bûcher, et, tout auprès, Philippe, qu’il ne reconnut pas d’abord. « Quel est donc, dit-il, celui qui est venu terminer ici sa destinée, et se reposer de ses travaux ? » Un moment après, jetant un profond soupir : « Hélas ! dit-il, c’est peut-être toi, grand Pompée ! » À peu de temps de là il descendit à terre, où il fut pris et tué.

Ainsi finit Pompée.

César ne tarda guère à se rendre en Égypte, où il trouva les affaires dans un grand trouble. On lui présenta la tête de Pompée ; mais il ne put soutenir la vue du scélérat qui la portait, et se détourna avec horreur. Il pleura quand on lui remit le cachet de Pompée, qui avait pour empreinte un lion armé d’un glaive. Il fit mettre à mort Achillas et Pothin ; le roi Ptolémée, défait dans un combat près du Nil, ne reparut pas depuis. Théodotus le sophiste se déroba à la vengeance de César : il s’enfuit d’Égypte, et fut longtemps errant, réduit à la dernière misère, et détesté de tout le monde. Mais Marcus Brutus, après avoir tué César et s’être rendu le maître en Asie, y découvrit Théodotus, et le fit expirer dans les tourments les plus cruels. Les cendres de Pompée furent portées à Cornélie, qui les déposa dans un tombeau à sa maison d’Albe.