Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/444

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Alexandre naquit le 6 du mois Hécatombéon[1], que les Macédoniens appellent Loûs ; auquel jour le temple de Diane fut brûlé à Éphèse. Hégésias de Magnésie fait, à ce propos, une exclamation si froide, qu’elle aurait suffi pour éteindre cet incendie[2] : « Belle merveille, dit-il, que le temple ait été brûlé, puisque Diane était occupée aux couches de la mère d’Alexandre ! » Tous les mages qui se trouvaient alors à Éphèse, persuadés que l’embrasement était le présage d’un autre malheur encore, couraient çà et là, se frappant le visage, criant que ce jour avait enfanté un fléau redoutable, et qui porterait dans l’Asie le ravage et la destruction. Philippe, qui venait de se rendre maître de Potidée, reçut en un même temps trois heureuses nouvelles : la première, que Parménion avait défait les Illyriens dans une grande bataille ; la seconde, qu’il avait remporté le prix de la course des chevaux de selle, aux jeux olympiques ; la troisième, qu’Alexandre était né. La joie qu’il ressentait, comme on peut croire, de tous ces bonheurs, s’accrut encore par les paroles des devins : « Un enfant, assuraient-ils, dont la naissance concourait avec trois victoires, devait être lui-même invincible. »

Les statues qui représentent le mieux la forme du corps d’Alexandre sont celles de Lysippe, le seul sculpteur auquel il eût permis de sculpter son image[3]. En effet, ces manières qu’affectèrent curieusement d’imiter dans la suite plu-

  1. Ce mois correspond en partie à notre mois de juillet, et en partie à celui d’août.
  2. Le jeu de mot de Plutarque vaut bien l’exclamation d’Hégésias. Du reste, Hégésias est cité par les anciens comme un écrivain d’un style froid et lâche.
  3. On connaît les vers d’Horace sur le goût d’Alexandre :

    Edicto vetuit ne quia se prœter Apellem
    Pingeret, aut alius Lysippo duceret œra
    Fortis Alexandri vultum simulantia.