Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/465

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même robe qu’il avait autrefois portée lui-même, lorsqu’il était astande[1] du roi ; puis, Alexandre était entré dans le temple de Bélus, et avait disparu. Le dieu annonçait, ce semble, assez manifestement, par cette vision, le haut degré de grandeur et d’éclat réservé à la puissance des Macédoniens : il voulait dire qu’Alexandre se rendrait maître de l’Asie, comme Darius avait fait autrefois, quand il était devenu roi, d’astande qu’il était ; mais qu’il quitterait bientôt la vie étant au comble de sa gloire.

La confiance de Darius s’accrut bien plus encore, lorsqu’il se fut persuadé que c’était par lâcheté qu’Alexandre faisait un si long séjour en Cilicie. Mais, ce qui arrêtait Alexandre en ce pays, c’était une maladie, attribuée par les uns à ses fatigues, par d’autres à un bain qu’il avait pris dans le Cydnus, dont l’eau est aussi froide que glace. Les médecins, persuadés que le mal était au-dessus de tous les remèdes, n’osaient lui administrer les secours nécessaires, craignant, s’ils ne réussissaient pas, d’encourir le ressentiment des Macédoniens ; seul, Philippe l’Acarnien surmonta cette crainte : voyant le roi dans un danger extrême, et se confiant en l’amitié que lui portait Alexandre, considérant, d’ailleurs, la honte dont il se couvrirait, s’il ne s’exposait au péril pour sauver cette vie menacée, en essayant pour la guérison les derniers remèdes au risque de tout pour lui-même, il lui proposa une médecine qu’il lui persuada de prendre avec confiance, s’il brûlait si fort de guérir et de se mettre en état de continuer la guerre. Sur ces entrefaites, Alexandre reçut une lettre que Parménion lui écrivait du camp, pour l’avertir de se tenir en garde

  1. D’autres lisent asgande, ou ascande, ou encore ascante. On ne sait pas bien quelles étaient les fonctions de l’astande : il y a apparence qu’elles étaient assez relevées, et donnaient une grande autorité. C’était, suivant l’opinion la plus probable, une sorte de secrétaire d’État, ou plutôt de secrétaire des commandements du roi.