Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/671

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engager au public, et il se portait caution de leurs engagements.

Lorsqu’il se crut en âge de se marier, et n’ayant encore eu commerce avec aucune femme, il voulut épouser Lépida, fiancée d’abord à Scipion Métellus, mais qui était libre alors, Scipion s’étant dédit et ayant rompu le contrat. Mais Scipion se ravisa, avant que Caton l’eût prise pour femme : il mit tout en œuvre pour renouer son mariage ; et il y parvint. Caton, vivement piqué de ce procédé, et brûlant de colère, voulait le poursuivre en justice : ses amis l’en dissuadèrent ; et il se borna à exhaler dans des ïambes le feu de sa jeunesse et de son ressentiment. Il versa sur Scipion toute l’amertume et tout le fiel d’Archiloque, sans se permettre cependant ni obscénités ni rien de puéril. Depuis il épousa Attilia, fille de Serranus, qui fut sa première femme, mais non pas la seule ; différant en cela de Lélius, l’ami de Scipion, qui, plus heureux, ne connut, durant le cours d’une longue vie, d’autre femme que la première qu’il avait épousée.

La guerre des esclaves, ou de Spartacus, comme on la nommait, éclata peu de temps après ; et Gellius fut chargé de cette expédition. Caton alla servir sous lui en qualité de volontaire, par attachement pour Cépion, son frère, qui commandait un corps de mille hommes ; mais il ne put faire paraître, autant qu’il l’aurait désiré, son ardeur et son courage, par suite de l’incapacité avec laquelle le général conduisit la guerre. Du reste, au milieu de la mollesse et-du luxe qui régnaient dans cette armée, il se signala par un tel amour de l’ordre et de la discipline, par tant de courage et de prudence, qu’on ne l’estimait nullement inférieur à l’ancien Caton. Gellius lui décerna des prix et des honneurs considérables ; mais il les refusa, disant qu’il n’avait rien fait qui méritât aucune distinction. Il se fit, par cette conduite, une réputation de bizarrerie.

On porta une loi qui défendait aux candidats d’avoir auprès