Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/152

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être aperçu, jusqu’à une des portes de la ville ; et là, montant un cheval qu’on lui avait préparé, il s’enfuit à Sicyone. On dit que, quand la nouvelle de cette fuite se fut répandue parmi les Corinthiens, il y eut entre eux une sorte de combat à qui arriverait le premier à Argos pour en informer Cléomène ; et Aratus écrit lui-même que tous leurs chevaux en crevèrent. Cléomène leur reprocha d’avoir laissé échapper Aratus, quand ils pouvaient aisément l’arrêter. Toutefois Aratus dit que Mégistonus lui fut envoyé par Cléomène, pour le prier de lui livrer l’Acrocorinthe, où les Achéens avaient une garnison, moyennant une somme d’argent considérable ; et qu’il répondit qu’il ne maîtrisait point les affaires, mais que les affaires le maîtrisaient. Voilà du moins ce qu’a écrit Aratus.

Cléomène partit d’Argos, et fit entrer dans l’alliance de Sparte les Trézéniens, les Épidauriens et ceux d’Hermione ; puis, s’étant rendu à Corinthe, il assiégea la citadelle, occupée par les Achéens, qui refusèrent de la lui livrer. Il manda les amis et les intendants d’Aratus, leur ordonna de prendre soin de sa maison et de ses biens, et de les lui conserver. En même temps il dépêcha encore vers lui Tritymallus le Messénien[1], pour lui proposer de consentir à ce que l’Acrocorinthe fût gardée par une garnison moitié achéenne moitié lacédémonienne, offrant en particulier de lui payer une pension double de celle que lui faisait le roi Ptolémée[2]. Mais Aratus n’y voulut point consentir : au contraire, il envoya son fils à Antigonus avec les autres otages, et persuada aux Achéens de décréter que l’Acrocorinthe serait remise entre les mains d’Antigonus. Alors Cléomène se jeta sur les terres de Sicyone, y fit le dégât, et s’empara de tous les biens d’Aratus, que les Corinthiens lui avaient

  1. Plutarque, dans la Vie d’Aratus, le nomme Triphylus.
  2. Il s’agit de Ptolémée Évergète.