Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/24

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Théophraste, que, les alliés ayant proposé qu’on fixât la quotité des contributions de chaque peuple, Crobylus le démagogue répondit : « La guerre ne se nourrit pas à une mesure réglée[1]. »

Ainsi donc toute la Grèce était soulevée et dans l’attente des événements ; les peuples et les villes de l’Eubée et de l’Achaïe, Corinthe, Mégare, Leucade et Corcyre avaient fait une ligue contre l’ennemi commun ; mais il restait encore à Démosthène l’affaire la plus importante : c’était d’attirer les Thébains dans la confédération, les Thébains, habitants d’une contrée limitrophe de l’Attique, qui avaient des troupes aguerries, et qui étaient alors, de tous les peuples de la Grèce, le plus renommé dans les armes[2]. Il n’était pas facile de gagner les Thébains, attachés et presque asservis à Philippe, par les services tout récents que leur avait rendus le roi dans la guerre phocique ; surtout parce que le voisinage d’Athènes et de Thèbes offrait aux deux villes de perpétuelles occasions de renouveler la guerre l’une avec l’autre.

Quoi qu’il en soit, Philippe, enflé du succès qu’il avait eu auprès d’Amphissa, se jeta brusquement sur l’Eubée, et s’empara de la Phocide. Les Athéniens étaient effrayés, personne n’osait monter à la tribune, l’incertitude et le silence régnaient dans l’assemblée ; Démosthène s’avança, et conseilla au peuple de solliciter les Thébains. Il encouragea les Athéniens par ses discours ; et, suivant son usage, il les remplit d’espérances. On l’envoya lui-même avec quelques autres en ambassade à Thèbes. Philippe, à ce que dit Marsyas[3], y dépêcha de son côté Amyntas et

  1. Allusion à la manière dont on rationnait la nourriture des esclaves.
  2. Depuis les victoires de Pélopidas et d’Épaminondas.
  3. Frère d’Antigonus, celui qui régna en Macédoine après la mort d’Alexandre. Il avait composé un ouvrage sur l’histoire de la Macédoine.