Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/576

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patrie ; mais je vois aujourd’hui que c’est un excellent juge du caractère et de la conduite des rois. Dans le principe, il a fait peu de cas de nous : il portait ses espérances hors de la Grèce, et admirait les richesses tant vantées de l’Égypte, ses éléphants, ses flottes et sa cour fastueuse. Maintenant qu’il a vu l’intérieur de la scène, et qu’il a reconnu que tout cet éclat n’est qu’une vaine décoration de théâtre, il s’est tourné vers nous. Aussi ai-je accueilli avec plaisir ce jeune homme, bien résolu de m’en servir en toute occasion ; et je vous prie de le regarder comme votre ami. » Ces paroles ayant été recueillies avec soin par les envieux et les méchants, et leur ayant fourni un prétexte d’écrire à Ptolémée, à l’envi l’un de l’autre, afin de lui donner contre Aratus des préventions fâcheuses, Ptolémée envoya quelqu’un à Aratus, pour se plaindre de sa conduite. Voilà comment dans les amitiés si ardentes de ces rois, qui, tels que des amants jaloux, se disputaient Aratus, se mêlaient l’envie et la malignité.

Aratus, ayant été élu pour la première fois général des Achéens, alla ravager la Calydonie et la Locride, qui est en face de l’Achaïe, et au delà du golfe de Corinthe. Ensuite il partit de là avec dix mille hommes, pour aller au secours des Béotiens ; mais il n’arriva qu’après qu’ils eurent eu perdu la bataille contre les Étoliens auprès de Chéronée, où le béotarque, Abœocritus, fut tué avec mille des siens. L’année suivante, ayant été nommé chef militaire une seconde fois, il se proposa de reprendre l’Acrocorinthe : entreprise qui ne tendait pas seulement à affranchir Sicyone et l’Achaïe, mais encore à chasser la garnison macédonienne, qui tenait la Grèce entière sous un joug tyrannique. Charès, général des Athéniens, après avoir obtenu un grand succès sur les généraux du roi de Perse, écrivit au peuple d’Athènes qu’il venait de remporter une victoire qu’on pouvait ap-