Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/59

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sures qu’ils jugeraient convenables pour le bon gouvernement et le salut de la république. C’est un parti auquel le Sénat se décide rarement, et seulement lorsqu’il craint quelque grand danger.

Cicéron, investi de ce pouvoir, confia à Quintus Métellus les affaires du dehors, et se chargea lui-même de celles de la ville : il ne marchait plus dans Rome d’ordinaire qu’escorté d’un grand nombre de citoyens ; et, lorsqu’il se rendait au Forum, la place était presque remplie de la foule qui le suivait. Catilina, impatient d’un plus long retard, résolut de courir au camp de Mallius ; mais, avant de quitter Rome, il chargea Marcius et Céthégus d’aller, dès le matin, avec des poignards, à la porte de Cicéron comme pour le saluer, de se jeter sur lui, et de le tuer. Une femme de grande naissance, Fulvie, se rendit la nuit chez Cicéron, pour lui révéler ce qui se préparait, et lui recommanda de se tenir en garde contre Céthégus. Les assassins vinrent dès la pointe du jour ; et, comme on leur refusa l’entrée, ils se plaignirent hautement, et firent beaucoup de bruit à la porte ; ce qui augmenta encore les soupçons. Cicéron, étant sorti, assembla le Sénat dans le temple de Jupiter Stator, qu’on trouve à l’entrée de la rue Sacrée, en allant au mont Palatin. Catilina s’y rendit avec les autres sénateurs, comme s’il voulait se justifier de ce qu’on lui imputait ; mais pas un des sénateurs ne voulut rester auprès de lui : ils quittèrent tous le banc sur lequel il s’était assis. Il commença néanmoins à parler ; mais sa voix ne put dominer leurs clameurs. À la fin, Cicéron se lève, et lui ordonne de sortir de la ville. « Puisque nous employons dans le gouvernement, lui dit-il, moi la parole, et toi les armes, il faut qu’il y ait entre nous des murailles qui nous séparent. » Catilina sortit sur-le-champ de Rome, à la tête de trois cents hommes armés : il se faisait précéder, comme s’il eût été un commandant militaire, de licteurs avec leurs