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LE BOUCLIER D’HERCULE

divinité, l’héritier d’Amphitryon, Hercule, lance à son tour, avec force, un long javelot contre son adversaire, entre le casque et le bouclier, au-dessous du menton, à l’endroit où le col reste à découvert. Les deux tendons sont tranchés par le trait homicide, car il est parti d’une puissante main. Cycnus tombe, comme tombent un chêne ou un roc élevé, frappés par la foudre fumante de Jupiter. Telle est sa chute et sur son corps retentissent ses armes d’airain.

Mais déjà s’en éloigne le fils de Jupiter, au cœur éprouvé par l’infortune. Attentif à l’attaque de Mars, le fléau des morts, il court le recevoir la fureur dans les yeux : comme un lion qui, tombant sur sa proie, s’applique à la déchirer de ses ongles puissants et lui a bientôt ravi la douce existence, son cœur au sang noir est plein de courroux ; l’azur de sa prunelle brille d’un éclat terrible ; de sa queue il se bat les flancs et les épaules ; de ses pieds il creuse la terre ; nul n’oserait soutenir son regard, ni s’en approcher pour le combattre. Tel l’héritier d’Amphitryon, insatiable de combats, courait à la rencontre de Mars, animé d’une belliqueuse confiance ; le dieu s’avançait de son côté, l’âme pleine de tristesse, et tous deux se joignirent avec de grands cris. Si d’un sommet élevé vient à tomber une roche, elle roule et bondit au loin avec un grand fracas, jusqu’à ce que sur son passage se rencontre une haute colline qu’elle va frapper et qui l’arrête. Ainsi pesant sur son char, marchait à grand bruit, avec des cris retentissants, le redoutable Mars : ainsi Hercule soutint le choc.

Cependant se présente, devant le dieu de la guerre, la fille de Jupiter, Minerve, portant la sombre égide

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