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LES TRAVAUX ET LES JOURS

Dans l’état présent de ta fortune, le mieux est de travailler, si tu veux, comme je t’y invite, laisser là ces désirs insensés du bien d’autrui, et ramener tes pensées vers d’utiles occupations.

L’indigent est en proie à la honte mauvaise, à la honte qui fait aux hommes tant de mal comme tant de bien.

La honte accompagne la pauvreté, et la confiance la richesse.

Aux biens que ravit la violence, préfère les biens que dispensent les dieux. Celui que le brigandage enrichit, ou dont la langue dépouille le faible, comme il arrive si souvent lorsque l’amour du gain égare le cœur de l’homme et que l’impudence chasse la pudeur, celui-là disparaît bientôt de la terre ; les dieux l’effacent, sa mission périt, et ses injustes richesses s’écoulent en peu de temps.

Pareil est le crime de celui qui maltraite un hôte, un suppliant ; qui monte furtivement dans le lit d’un frère pour souiller son épouse, pressé d’un criminel désir ; qui trompe et dépouille d’innocents orphelins ; qui insulte de dures paroles un père arrivé au terme de la triste vieillesse. Jupiter s’indigne de tels actes, et, à la fin, il les paye d’un cruel retour. Que ton âme imprudente, ô Persès, les tienne toujours éloignés d’elle !

Sacrifie aux dieux, selon ton pouvoir, avec un cœur pur, des mains innocentes, brûlant sur les autels les grasses cuisses de la victime. Ne manque pas de leur offrir des libations et des parfums, soit au moment de te retirer dans ta couche, soit au retour de la lumière. Mérite ainsi qu’ils te soient propices (et que tu puisses acheter l’héritage d’autrui sans jamais vendre le tien).