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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

développa dans toutes ses variétés le genre de poésie dont il passe pour avoir été le créateur. Lui-même, il nous raconte, dans les Œuvres et Jours, qu’il aurait une seule fois franchi la mer, pour aller d’Aulis à Chalcis en Eubée prendre part aux jeux solennels, tenus dans cette ville par les fils d’Amphidamas à l’occasion des funérailles de leur père, qu’il y remporta le prix du chant consistant en un trépied, consacré par lui plus tard aux Muses Héliconiades, dans le lieu même où elles l’avaient visité de leur première inspiration. Ce récit, déjà suspect en soi, fut orné dans la suite de circonstances de plus en plus fabuleuses et devint à la fin le petit roman de la basse antiquité que nous avons sous le titre de Combat d’Homère et d’Hésiode. S’il y a quelque chose d’historique dans cette lutte supposée entre les deux illustres maîtres de l’épopée grecque, c’est le contraste non moins réel que l’affinité des deux genres poétiques qu’ils représentent ; c’est tout au plus, comme on l’a conjecturé, la rivalité des deux écoles qui procédèrent de l’un et de l’autre, rivalité où l’avantage put demeurer parfois aux rhapsodes hésiodiques. Que, du reste, Homère et Hésiode aient été contemporains, qu’ils aient appartenu à la même famille et que leur commune généalogie remonte jusqu’à Orphée ou jusqu’a tel autre des chantres mythiques de la Thrace, c’est ce qu’on ne peut admettre qu’à titre de rapprochement plus ou moins hasardé, nullement de tradition authentique. L’antiquité en était, comme nous, réduite à des inductions et à des hypothèses sur l’époque où