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NOTICE SUR SOLON

dence et leur lâcheté, il les exhortait, il les pressait vivement de ne pas trahir la cause de la liberté. Ce fut dans cette occasion qu’il dit ce mot devenu depuis si célèbre : « Avant ce jour il vous eût été facile de réprimer la tyrannie naissante ; maintenant qu’elle est établie ; il sera plus grand et plus glorieux de la détruire. » Mais quand il vit que la frayeur avait saisi tous les citoyens, et que personne ne l’écoutait, il rentra chez lui, prit ses armes et les posa dans la rue, devant sa porte, en disant : « J’ai défendu autant qu’il m’a été possible la patrie et les lois ; » et depuis il se tint tranquille. Ses amis lui conseillaient de prendre la fuite ; mais il ne daigna pas même les écouter, et resta dans sa maison, s’occupant à faire des vers dans lesquels il reprochait aux Athéniens toutes leurs fautes : « Si vous avez souffert ces maux par votre lâcheté ; n’accusez pas les dieux d’en être les auteurs. Vous avez grandi vous-mêmes ceux qui vous oppriment en leur donnant des gages et voilà pourquoi vous êtes opprimés par la servitude. »

On ne cessait pourtant de l’avertir que le tyran irrité de ces vers, le ferait mourir ; et comme on lui demandait sur quoi il se fiait pour parler avec tant d’audace : « Sur ma vieillesse » répondit-il. Mais quand Pisistrate fut devenu entièrement le maître, il donna à Solon tant de marques de considération et de bienveillance, il l’appela si souvent auprès de sa personne qu’enfin ce législateur devint son conseil et approuva la plupart des choses qu’il fit. Il est vrai