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POÉSIES

Quelle honte pour vous, qui voyez sans pitié
Toutes les faiblesses humaines,
Si, pour punir les torts faits à mon amitié,
Quelque Iris vous rendait plus fou de la moitié
Que tous les Céladons, que tous les Artamènes !
Sur vos doctes emplois ne vous assurez pas.
Tremblez, Damon, tremblez : la raison des grands hommes,
Tant des siècles passés que du siècle où nous sommes,
Dans un si beau chemin a fait plus d’un faux pas.
Ce petit dieu malin, au dos chargé de plumes,
Dont le dépit, les amertumes,
Sont pour les tendres cœurs des sources de plaisirs,
Vous fera, s’il le veut, pousser de longs soupirs
Au milieu de mille volumes.

Contre la rigueur des destins
La morale pourrait rendre une âme assez forte :
Mais, Damon, eussiez-vous des Grecs et des Latins
Toutes les raisons pour escorte,
L’Amour n’en serait pas d’un jour plus tard vainqueur.
Lorsqu’il veut entrer dans un cœur,
Il ne s’amuse pas à frapper à la porte.
Il aime à triompher de l’orgueil d’un savant ;
C’est sa plus éclatante et plus douce victoire.
Ces sages qu’on nous vante tant,