Ne te lasse donc plus d’inutiles complaintes ;
Mais, sage à l’avenir,
Aime une ombre comme ombre, et des cendres éteintes
Éteins le souvenir.
C’est bien, je le confesse, une juste coutume,
Que le cœur affligé,
Par le canal des yeux versant son amertume,
Cherche d’être allégé.
Même quand il advient que la tombe sépare
Ce que la nature a joint,
Celui qui ne s’émeut a l’ame d’un barbare,
Ou n’en a du tout point.
Mais d’être inconsolable et dedans sa mémoire
Enfermer un ennui,
N’est ce pas se haïr pour acquérir la gloire
De bien aimer autrui ?
Priam qui vit ses fils abattus par Achille,
Dénué de support
Et hors de tout espoir du salut de sa ville,
Reçut du réconfort.
François, quand la Castille, inégale à ses armes,
Lui vola son dauphin[1],
- ↑ François, dauphin de France, fils aîné de François I. Il mourut empoisonné le 28 février 1536, âgé de 18 ans, et l’on attribua cette mort si prématurée à la cour de Madrid, qui redoutait les talents que ce jeune prince faisait voir pour la guerre. Édit.