Page:Poésies de Schiller.djvu/168

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LE GÉNIE.

« Croirai-je, me dis-tu, aux enseignements des maîtres de la sagesse, aux paroles qu’une foule de disciples proclament comme des dogmes certains ? La science seule peut-elle me conduire à une paix assurée ? Le bonheur et la justice reposent-ils sur un échafaudage de systèmes ? Dois-je me défier de ce mouvement intérieur, de cette loi que tu as toi-même, ô nature, gravée dans mon sein, avant que l’école imprimât son cachet sur une sentence éternelle et que mon esprit ardent fût enchaîné par de rigoureuses formules ? Dis-moi, toi qui es descendu dans ses profondeurs, ce que l’on rapporte de la poussière des tombeaux ; dis-moi ce qu’il y a de caché dans l’obscurité des morts, et si les vivants doivent chercher parmi des momies leur consolation. Dois-je m’aventurer dans ces routes ténébreuses ? Elles m’effrayent, je l’avoue ; mais je les suivrai cependant si elles doivent me conduire à la vérité.

— Mon ami, tu connais cet âge d’or dont les poètes nous ont fait de naïfs et touchants récits ; tu connais ce temps où la vertu habitait la terre, où