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Page:Poésies de Schiller.djvu/60

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Je plaçai cette lourde image sur des pieds raccourcis et je la couvris d’une cuirasse écaillée et scintillante.

« Le cou s’étendait en avant ; la gueule, terrible et pareille à une porte d’enfer, s’ouvrait comme pour dévorer sa proie ; au milieu d’une rangée de dents aiguës et sous un noir palais on voyait une langue pareille à la pointe d’une épée ; les yeux lançaient des éclairs ; le dos se terminait par une queue de serpent qui se repliait sur elle-même comme pour enlacer homme et cheval.

« Je fis façonner ainsi cette image exacte et je la revêtis d’une couleur sombre et sinistre. Je vis alors le monstre à moitié dragon, à moitié vipère, enfanté dans un marais empoisonné. Lorsque l’image fut achevée, je choisis un couple de dogues forts, alertes, habitués à s’élancer sur les animaux féroces ; je les exerçai à se jeter sur le dragon en excitant leur colère, en les guidant de la voix, et à le saisir avec leurs dents acérées.

« Je leur appris à faire entrer les dents au milieu du ventre, à l’endroit même où le monstre n’est protégé que par une molle toison. Et moi, couvert de mes armes, je monte sur mon cheval arabe, j’excite son ardeur, je le guide vers le dragon en l’aiguillonnant avec l’éperon, et je brandis mon glaive comme si je voulais pourfendre l’image.

« Mon cheval se cabre, écume, résiste à la bride ;