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Page:Poe - Contes grotesques trad. Émile Hennequin, 1882.djvu/9

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de la scène, et commença avec sa femme une existence de misère, vaguant d’état en état, chargé des derniers rôles, médiocre dans une profession que le manque de talent rend ignoble. Sa femme, au contraire, était une artiste de haute valeur. Elle jouait les héroïnes de Shakespeare et le public la tenait en grande estime. Il reste d’elle un portrait que M. Ingram a fait photographier. C’était une belle femme, possédant de grands yeux noirs et un front élevé. Edgar Poe lui ressembla plus qu’à son père, par les traits, l’esprit, et un certain tour théâtral de caractère.

Elisabeth Poe eut trois enfants ; Léonard, qui fut recueilli à la mort de sa mère, par ses grands parents et qui périt à 20 ans, après une vie d’excès ; Edgar ; et Rosalie Poe enfant posthume, presqu’idiote, adoptée, à la mort de sa mère également, par une famille écossaise, les Mac Kenzie, puis reléguée dans une institution charitable, où elle mourut en 1874.

Edgar Poe naquit, lui, le 19 janvier 1809, à Boston. Ce sont là les dates qu’il a inscrites lui-même sur les registres de l’Université de Charlottesville. Il est curieux et significatif de savoir que quelques mois avant sa naissance, le 18 avril 1808, David et Elisabeth Poe jouaient à New-York les Brigands de Schiller, Mme Poe remplissant le rôle d’Amélie. Le choix de cette pièce excessive, pleine de toutes les horreurs romantiques, avait dû beaucoup préoccuper les Poe, qui la donnaient à leur bénéfice, dans un moment d’embarras pécuniaire, et put contribuer à déterminer la névrose dont leur fils souffrit toute sa vie.

Pendant deux ans Edgard Poe mena la vie vagabonde de ses parents ; puis, au commencement de 1811, son père fut emporté par une phtisie galopante et, à la fin de la même année, sa mère mourut aussi et du même mal, à Richmond. On s’intéressa dans cette ville à l’orphelin. Un riche négo-