Page:Poe - Contes inédits traduction William L. Hughes, Hetzel.djvu/123

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ressentis en voyant se précipiter à travers les fenêtres et tomber pèle-mêle au milieu de nous, bataillant, frappant des pieds, égratignant et criant, toute une armée d’ennemis, que je pris pour des chimpanzés, des orangs-outangs ou des babouins noirs du cap de Bonne-Espérance.

Je reçus pour ma part une terrible volée de coups de bâton ; puis je parvins à me faufiler sous un meuble et je me tins coi. J’y restai un quart d’heure, prêtant l’oreille à ce qui se passait ; enfin je devinai le mot de l’énigme.

M. Maillard, à ce qu’il paraît, en me racontant l’histoire du pensionnaire qui avait poussé à la révolte ses camarades d’infortune, s’était tout simplement fait le chroniqueur de ses propres exploits. Ce gentleman, en effet, avait autrefois rempli le poste d’administrateur de la maison ; mais, deux ou trois ans avant ma visite, la perte de sa raison l’avait placé au nombre des malades, détail qu’ignorait mon compagnon de voyage. Les gardiens, attaqués à l’improviste, accablés par le nombre, avaient été bien frottés de goudron, puis recouverts d’une couche de plumes et enfermés dans les caves. Ils y étaient restés plus d’un mois ; durant leur captivité, M. Maillard avait non-seulement renouvelé chaque jour le goudron et les plumes qui constituaient son « système », mais