Page:Poe - Contes inédits traduction William L. Hughes, Hetzel.djvu/15

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presque la mignonne symétrie de sa personne annonçait bien plus cette activité dont il venait de faire preuve, que la force herculéenne qu’on lui avait vu déployer sans effort en mainte conjoncture plus dangereuse. Avec la bouche et le menton d’un dieu, avec de grands yeux étranges, sauvages, d’un éclat humide et dont la couleur variait du brun-noisette au noir de jais, il avait des traits d’une régularité aussi classique que ceux du buste de l’empereur Commode. Néanmoins, c’était là une de ces physionomies comme chacun en a rencontré à une époque quelconque de sa vie pour ne plus la revoir ; elle n’avait aucune expression stéréotypée ou dominante qui pût la fixer dans la mémoire, — un de ces visages qu’on oublie dès qu’on l’a vu, tout en éprouvant un vague et continuel désir de se le rappeler. Non que chaque rapide passion manquât jamais de se refléter distinctement sur ces traits comme dans un miroir ; seulement, le miroir vivant était aussi impuissant que les autres à conserver la moindre trace de la passion disparue.

En me quittant, le soir de l’aventure en question, il me pria, avec une insistance qui m’étonna un peu, d’aller le voir le lendemain de très-bonne heure. Peu de temps après le lever du soleil, je me rendis donc à son palais, vaste édifice d’une splen-