Page:Poe - Contes inédits traduction William L. Hughes, Hetzel.djvu/20

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« Voici, reprit-il en se levant pour prendre mon bras et se promener dans le salon, voici des tableaux de tous les temps, depuis les Grecs jusqu’à Cimabue et depuis Cimabue jusqu’à nous. Beaucoup de ces toiles, vous le voyez, ont été choisies sans égard pour l’opinion des connaisseurs. Toutes forment, néanmoins, une tapisserie convenable pour une salle telle que celle-ci. Voici des ébauches d’artistes célèbres dans leur temps, dont la perspicacité des académies a abandonné jusqu’aux noms à l’oubli et à moi. Que dites-vous, continua-t-il en se retournant brusquement, de cette Madonna della Pietà ?

— On dirait un Guido ! m’écriai-je avec tout l’enthousiasme dont j’étais capable ; car je venais d’examiner attentivement cette toile d’une beauté sans pareille. Un vrai Guido ! Où avez-vous pu vous le procurer ? Cette Vierge est en peinture ce que la Vénus est en sculpture !

— Ah ! oui, reprit-il d’un ton rêveur. La Vénus ? la belle Vénus, la Vénus de Médicis, n’est-ce pas ? La Vénus à la petite tête et aux cheveux d’or ? Une partie du bras gauche (ici, il baissa la voix au point que j’eus assez de peine à l’entendre) et tout le bras droit sont des restaurations ; et, à mes yeux, la pose coquette de ce bras droit représente la quintessence de l’affectation… Parlez-moi de Canova ! Cet Apollon n’est qu’une copie, il ne saurait exister