Page:Poe - Derniers Contes.djvu/154

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Un bateau à vapeur est sur le point de larguer. Un voyageur, son porte-manteau à la main, accourt de toutes ses forces du côté de l’embarcadère. Tout à coup, il s’arrête tout court, et ramasse avec une grande agitation quelque chose sur le sol. C’est un portefeuille. « Qui a perdu un portefeuille ? » se met-il à crier. Personne ne peut assurer avoir perdu son portefeuille ; mais l’émotion est vive, quand on apprend que la trouvaille est de valeur. Le bateau, cependant, ne peut attendre.

« Le temps et la marée n’attendent personne, » crie le capitaine.

« Pour l’amour de Dieu, encore quelques minutes ! » dit l’auteur de la trouvaille ; « le vrai propriétaire va se présenter. »

« On ne peut attendre ! » réplique le capitaine ; « larguez, entendez vous ! »

« Que vais-je donc faire ? » demande l’homme, en grande peine. « Je vais quitter le pays pour quelques années, et je ne puis en conscience garder cette somme énorme en ma possession. — Pardon, monsieur, (s’adressant à un gentilhomme sur la rive) mais vous m’avez l’air d’un honnête homme. Voulez-vous me rendre le