Aller au contenu

Page:Poe - Derniers Contes.djvu/220

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

virent ce cauchemar, je restai sans mouvement. Je ne me sentais pas le courage de me mouvoir. Je n’osais pas faire l’effort nécessaire pour me rendre compte de ma destinée ; et cependant il y avait quelque chose dans mon cœur qui me murmurait que c’était vrai. Le désespoir — un désespoir tel qu’aucune autre espèce de misère n’en peut inspirer à un être humain — le désespoir seul me poussa après une longue irrésolution à soulever les lourdes paupières de mes yeux. Je les soulevai. Il faisait noir — tout noir. Je reconnus que l’accès était passé. Je reconnus que ma crise était depuis longtemps terminée. Je reconnus que j’avais maintenant recouvré l’usage de mes facultés visuelles. — Et cependant il faisait noir — tout noir — l’intense et complète obscurité de la nuit qui ne finit jamais.

J’essayai de crier, mes lèvres et ma langue desséchées se murent convulsivement à la fois dans cet effort ; — mais aucune voix ne sortit des cavernes de mes poumons, qui, oppressées comme sous le poids d’une montagne, s’ouvraient et palpitaient avec le cœur, à chacune de mes pénibles et haletantes aspirations.