Page:Poe - Histoires extraordinaires (1869).djvu/119

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pair ? Notre écolier répond : « Impair ! » et il a perdu. Mais, à la seconde épreuve, il gagne, car il se dit en lui-même : « Le niais avait mis pair la première fois, et toute sa ruse ne va qu’à lui faire mettre impair à la seconde ; je dirai donc : « Impair ! » Il dit : « Impair », et il gagne.

» Maintenant, avec un adversaire un peu moins simple, il aurait raisonné ainsi : « Ce garçon voit que, dans le premier cas, j’ai dit impair, et, dans le second, il se proposera, — c’est la première idée qui se présentera à lui, — une simple variation de pair à impair comme a fait le premier bêta ; mais une seconde réflexion lui dira que c’est là un changement trop simple, et finalement il se décidera à mettre pair comme la première fois. — Je dirai donc : « Pair ! » Il dit pair, et gagne. Maintenant, ce mode de raisonnement de notre écolier, que ses camarades appellent la chance, — en dernière analyse, qu’est-ce que c’est ?

— C’est simplement, dis-je, une identification de l’intellect de notre raisonneur avec celui de son adversaire.

— C’est cela même, dit Dupin ; et, quand je demandai à ce petit garçon par quel moyen il effectuait cette parfaite identification qui faisait tout son succès, il me fit la réponse suivante :

» — Quand je veux savoir jusqu’à quel point quelqu’un est circonspect ou stupide, jusqu’à quel point il est bon ou méchant, ou quelles sont actuellement ses pensées, je compose mon visage d’après le sien, aussi exacte-