Page:Poe - Histoires extraordinaires (1869).djvu/265

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que toutes les douleurs que j’avais endurées pendant les deux dernières heures devaient être attribuées uniquement aux effets d’une respiration insuffisante.

À neuf heures moins vingt, — c’est-à-dire peu de temps après avoir fermé l’ouverture de ma chambre, — le mercure avait atteint son extrême limite et était retombé dans la cuvette du baromètre, qui, comme je l’ai dit, était d’une vaste dimension. Il me donnait alors une hauteur de 132,000 pieds ou de 25 milles, et conséquemment mon regard en ce moment n’embrassait pas moins de la 320e partie de la superficie totale de la terre. À neuf heures, j’avais de nouveau perdu de vue la terre dans l’est, mais pas avant de m’être aperçu que le ballon dérivait rapidement vers le nord-nord-ouest. L’Océan, au-dessous de moi, gardait toujours son apparence de concavité ; mais sa vue était souvent interceptée par des masses de nuées qui flottaient çà et là.

À neuf heures et demie, je recommençai l’expérience des plumes, j’en jetai une poignée à travers la soupape. Elles ne voltigèrent pas, comme je m’y attendais, mais tombèrent perpendiculairement, en masse, comme un boulet, et avec une telle vélocité, que je les perdis de vue en quelques secondes. Je ne savais d’abord que penser de cet extraordinaire phénomène ; je ne pouvais croire que ma vitesse ascensionnelle se fût si soudainement et si prodigieusement accélérée. Mais je réfléchis bientôt que l’atmosphère était maintenant trop raréfiée pour soutenir même des plumes, — qu’elles