Page:Poe - Histoires extraordinaires (1869).djvu/370

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V. Oui ; je vois maintenant la confusion d’idées. Le mouvement est l’action de l’esprit, non de la pensée. La matière imparticulée, ou Dieu à l’état de repos, est, autant que nous pouvons le concevoir, ce que les hommes appellent esprit. Et cette faculté d’automouvement — équivalente en effet à la volonté humaine — est dans la matière imparticulée le résultat de son unité et de son omnipotence ; comment, je ne le sais pas, et maintenant je vois clairement que je ne le saurai jamais ; mais la matière imparticulée, mise en mouvement par une loi ou une qualité contenue en elle, est pensante.

P. Ne pouvez-vous pas me donner une idée plus précise de ce que vous entendez par matière imparticulée ?

V. Les matières dont l’homme a connaissance échappent aux sens, à mesure que l’on monte l’échelle. Nous avons, par exemple, un métal, un morceau de bois, une goutte d’eau, l’atmosphère, un gaz, le calorique, l’électricité, l’éther lumineux. Maintenant, nous appelons toutes ces choses matière, et nous embrassons toute matière dans une définition générale ; mais, en dépit de tout ceci, il n’y a pas deux idées plus essentiellement distinctes que celle que nous attachons au métal, et celle que nous attachons à l’éther lumineux. Si nous prenons ce dernier, nous sentons une presque irrésistible tentation de le classer avec l’esprit ou avec le néant. La seule considération qui nous retient est notre conception de sa constitution atomique. Et encore,