Page:Poe - Histoires extraordinaires (1869).djvu/446

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rible et contre nature. Dans l’éblouissement du midi, — aux heures profondes de la nuit, — malade ou bien portant, — dans le calme ou dans la tempête, — le jeune Metzengerstein semblait cloué à la selle du cheval colossal dont les intraitables audaces s’accordaient si bien avec son propre caractère.

Il y avait, de plus, des circonstances qui, rapprochées des événements récents, donnaient un caractère surnaturel et monstrueux à la manie du cavalier et aux capacités de la bête. L’espace qu’elle franchissait d’un seul saut avait été soigneusement mesuré, et se trouva dépasser d’une différence stupéfiante les conjectures les plus larges et les plus exagérées. Le baron, en outre, ne se servait pour l’animal d’aucun nom particulier, quoique tous les chevaux de son haras fussent distingués par des appellations caractéristiques. Ce cheval-ci avait son écurie à une certaine distance des autres ; et, quant au pansement et à tout le service nécessaire, nul, excepté le propriétaire en personne, ne s’était risqué à remplir ces fonctions, ni même à entrer dans l’enclos où s’élevait son écurie particulière. On observa aussi que, quoique les trois palefreniers qui s’étaient emparés du coursier, quand il fuyait l’incendie de Berlifitzing, eussent réussi à arrêter sa course à l’aide d’une chaîne à nœud coulant, cependant aucun des trois ne pouvait affirmer avec certitude que, durant cette dangereuse lutte, ou à aucun moment depuis lors, il eût jamais posé la main sur le corps de la bête. Des preuves d’intelligence particulière dans la conduite