Page:Poe - Les Poèmes d’Edgar Poe, trad. Mallarmé, 1889.djvu/177

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SCOLIES

Et encore : « Il y a tout autour comme une saveur d’ambroisie. » Et « nous nommons ces vers le plus remarquable des poèmes d’adolescence, que nous ayons lu. Nous n’en savons aucun qu’on puisse lui comparer pour la maturité d’idées et l’intelligence exquise de la langue et du maître. »

Assez d’éloges, certes, pour qu’il m’ait été permis de faire des poèmes antérieurs passer dans le choix classique ce joyau. Vers de la première jeunesse du poète, et (nous apprend l’autre Hélène magnifiquement célébrée dans le grand morceau plus loin) dédiés à une dame dont Poe continue de parler dans une lettre écrite un an avant de mourir, comme « du seul, et idolâtre amour, purement idéal, de sa jeunesse passionnée ». L’histoire est touchante et illustre la nature enfantine de Poe. « Aux jours de l’université de Richmond, qui le posséda très jeune, il accompagnait à la maison un de ses camarades, quand il vit pour la première fois Mrs. H… S…, la mère du jeune ami. Cette dame, dès son entrée dans la chambre, lui prit la main et proféra quelques mots d’accueil charmants et gracieux qui pénétrèrent le cœur sensitif de l’orphelin, au point de lui enlever jusqu’au pouvoir de parler et, pendant un instant, presque toute conscience. Il revint chez lui dans un rêve, avec une pensée unique, un seul espoir en sa vie — d’entendre de nouveau les douces et gracieuses paroles qui avaient rendu si beau pour lui le monde désolé, et accablé son cœur solitaire de l’oppression d’une joie nouvelle. Cette