Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 8, 1931.djvu/18

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M. Mirman me conduit ensuite à la caserne Molitor où sont hospitalisés près de deux mille réfugiés de villages lorrains. On les réunit tous, vieillards, femmes et enfants, dans un vaste manège transformé en église. Nous leur adressons, le préfet et moi, des paroles de sympathie et d’encouragement. Je leur laisse également un peu d’argent pour améliorer leur ordinaire de la journée.

De là, je reviens sur la charmante place Stanislas, que les bombes ont heureusement épargnée, et dont toutes les portes et les grilles sont intactes ; et je monte à l’hôtel de ville, dans la salle du conseil municipal. Le maire me remercie au nom de la population nancéenne. Il tient à me déclarer que, hormis ceux qui sont mobilisés, aucun membre du conseil municipal n’a quitté et ne quittera jamais son poste, et il m’exprime leur foi commune dans la victoire. Je réponds que la ville de Nancy paie actuellement la cruelle rançon de la liberté. Les Allemands croyaient bien, au début de la campagne, qu’ils allaient s’emparer d’elle. Autant était ardente leur convoitise, autant fut vive leur déception. Sans aucun objectif militaire, ils ont voulu se venger, sur la grande cité lorraine, de l’héroïsme avec lequel elle fut défendue contre eux. Le crime commis contre une ville ouverte soulèvera l’indignation du monde entier. Il ne pourra que fortifier, dans l’âme de notre armée, la volonté de vaincre.

Ma présence a été peu à peu connue des habitants et sur la place, la foule s’est massée et m’acclame.

Après avoir déjeuné dans mon train, je vais voir comment nous essayons de contrebattre la pièce allemande. On croit qu’elle se trouve au