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LE LENDEMAIN D’AGADIR

condamner son attitude, M. Lebrun avait eu grand’peine, en séance, à cacher la douleur qui l’étreignait ; mais, ne s’étant associé aux négociations que par devoir et par amour de la paix, il s’était contenu, avait gardé le silence et était resté à son poste. De mon côté, je ne comprenais pas qu’on pût voir, dans l’accord du 4 novembre 1911, non plus que dans celui du 8 février 1909, une consécration de la violence faite par le traité de Francfort à la liberté des populations annexées. Dans tous les ministères dont j’avais fait partie, aussi bien de 1893 à 1895 qu’en 1906, j’avais approuvé des ententes particulières conclues avec l’Allemagne. Je n’avais jamais pensé que la fidélité à nos souvenirs nous commandât, à l’égard de nos voisins, une sorte d’animosité chronique et nous interdît, à eux et à nous, sur tous les points du globe, l’espoir d’accommodements déterminés. Je n’avais donc eu aucun scrupule à accepter le rapport ; et autant, pour le rédiger, j’étais obligé de connaître la vérité sur le passé, autant, après avoir fait, sans parti pris, la balance des avantages et des inconvénients, j’étais résolu à recommander l’adoption du traité.

Tout de suite, je me mis au travail. Lorsque, après les congés du nouvel an, recommencèrent les séances de la Commission, j’avais achevé l’étude des volumineux dossiers qui m’avaient été communiqués par le gouvernement. J’avais pu avoir, en outre, avec le président du Conseil et le ministre des Affaires étrangères, de longues conversations, qui m’avaient permis de justifier, devant mes collègues, l’approbation de l’accord.

Le mardi 9 janvier, M. Caillaux et M. de