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LA VICTOIRE

suivra volontiers ses avis. Il m’annonce très simplement, que les Belges ont fait, le matin, 450 prisonniers. Je laisse le roi à Houthen et pars, par Dunkerque, avec le général Pauffin de Saint-Morel. On commence à tendre devant Dunkerque les inondations d’eau douce. On n’a pas encore pris parti pour les inondations d’eau de mer dans la région des Moëres, parce qu’elles dévastent le pays pour quinze ans.

À Dunkerque, il reste quatorze mille cinq cents habitants qui passent les nuits dans les caves. La ville est bombardée de longue portée presque tous les jours. Mais les plus grands dégâts sont faits par les expéditions aériennes. Je suis reçu par Terquem et ses conseillers dans le cabinet du maire dont le plafond à caissons est tout détérioré, la grande cheminée à demi détruite et les vitraux brisés. C’est dans cette pièce, alors intacte, que j’ai été fêté en 1912. Nous échangeons quelques paroles émues. Le moral, me dit Terquem, est excellent dans la population. Il est resté beaucoup de femmes et d’enfants.

À cinq heures et demie, je reprends mon train en gare de Dunkerque. Sainsère a téléphoné de Paris que Bolo a été fusillé ce matin sans incident, que Clemenceau s’est présenté cet après-midi à la Commission des Affaires extérieures de la Chambre et a eu un grand succès. Ensuite, un débat a été engagé devant la Chambre elle-même et se déroule favorablement pour le cabinet. Mais hier Clemenceau disait qu’il n’accepterait aucun débat.

Le roi Albert m’a dit qu’il examinerait s’il y avait lieu, pour la Belgique, de demander une représentation à Versailles, mais il n’a pas formé cette demande. La reine va tous les jours à La Panne. Elle s’y occupe de ses hôpitaux et y déjeune. La route de la ferme à La Panne est bom-