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LA VICTOIRE

combles sont détruits, une malheureuse domestique, à demi écrasée par les décombres, est emportée à l’hôpital Cochin. Je me rends sur les lieux, je monte au grenier de la maison, je cause avec le concierge et les locataires. Toujours bon état moral. Je vais ensuite à Cochin, mais j’arrive pendant que la blessée est sur la table d’opération. Clemenceau vient me voir et me demande : « Vous connaissez le télégramme du général Guillaumat ? Je trouve étrange que le gouvernement anglais rappelle dix bataillons de Salonique sans se mettre d’accord avec nous. J’ai déjà protesté auprès du général Wilson. Je demande que la question soit soumise au comité de Versailles. Je lui soumettrai en même temps celle des transports américains. Nous étions d’accord avec le général Bliss et avec le président Wilson pour qu’on nous envoyât avant tout des hommes. On continue à nous envoyer de l’artillerie. Nous avons besoin de compléter nos effectifs. C’est la question qui prime toutes les autres ! » J’approuve Clemenceau très nettement sur les deux points et il m’assure qu’il va agir en conséquence. Il me parle ensuite à bâtons rompus de quelques autres questions. « Barthou, me dit-il, m’a renseigné sur certaines légèretés de Pams. Je n’en connaissais rien. C’est un provincial à Paris. Je lui ai fait faire quelques observations amicales par Mandel, qui est très bien avec lui. Il ne faudrait pas qu’il chaussât les souliers de Malvy. Quant à l’affaire Sixte, ne vous préoccupez pas ; la campagne pacifiste est déjà finie. — Oh ! oh ! fais-je avec incrédulité. »

Clemenceau me parle ensuite de Dubail qu’il veut remplacer au gouvernement militaire et à qui il reproche d’avoir déjeuné chez Paul Meunier. Je lui conseille de ne pas remplacer Dubail avant que soit terminée l’affaire Caillaux, pour qu’on ne puisse supposer que le changement a été