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BRIAND INTERVIENT À LA COMMISSION

proclamer qu’on n’avait laissé échapper l’an dernier aucune occasion de paix. — Oui, mais j’ai fait très nettement une déclaration sur ce point. »

En même temps, Clemenceau conseille à Pichon, qui doit accompagner mardi à la commission Paul Cambon et William Martin, de profiter de l’occasion pour bien expliquer qu’aucune possibilité de paix ne s’était présentée en 1917.

Pendant toute la discussion qui suit en comité de guerre, Clemenceau jette quelques plaisanteries. Il ne fait connaître son opinion que sur la question des prisonniers demandés par l’armée américaine. Là, il bondit : « Des gens qui n’ont que 120 000 hommes en ligne sur 400 000 nous demandent des travailleurs ! Qu’ils en prennent parmi leurs services d’arrière ! » Et il répète les chiffres : 120 000 sur 400 000 avec tant d’insistance que Pétain les rectifie : « Non, dit-il, ils ont quatre divisions en ligne ; mettons 120 000 ou 125 000 ; mais, sur le restant, ils ont trois divisions à l’instruction. Ce n’est donc que 200 000 sur 400 000, qu’ils ont à l’arrière ; c’est trop, sans doute, mais n’exagérons pas. »

Barthou vient me voir vers cinq heures pour me rendre compte de ce qui s’est passé hier à la Commission. Il trouve que Briand a été assez embarrassé et surtout très vague, mais néanmoins hostile ; il a jeté son poison contre le cabinet pour faire diversion à l’affaire Lancken. Il a toutefois déclaré qu’il n’avait jamais cru à la possibilité d’une paix séparée avec l’Autriche ; mais, sans appuyer, il a indiqué qu’il avait cru bon, au contraire, d’écouter l’Allemagne et de donner au soldat qui se bat l’impression qu’on ne négligeait pas les moyens diplomatiques. « Clemenceau, me dit Barthou, a nettement déclaré qu’il s’opposerait à une discussion publique sur l’affaire Sixte. Il a dit non moins nettement qu’il approu-