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la victoire

étrangères en disant qu’ils seraient très heureux de voir un réveil se produire en Russie, qu’il est difficile de prendre parti pour certaines organisations et non pour d’autres, qu’il serait désirable qu’un accord s’établît en Russie et qu’alors les Alliés pourraient sans doute essayer de favoriser le mouvement.

Il me répond confusément et me laisse parfaitement deviner qu’il compte sur notre appui préalable pour encourager les organisations francophiles à se créer.

Sembat revient à l’Élysée et m’amène Branting. Cheveux et barbe d’un blond grisonnant, figure mâle et douce, Branting est toujours convaincu du succès des Alliés. Avant de me quitter, Sembat me demande devant lui mon impression sur Kerensky. « Je crains, lui dis-je, qu’il ne se fasse des illusions sur ses forces. — Il s’en fait certainement », déclare Branting avec netteté. Nous parlons de la guerre dont il impute toute la responsabilité à l’Allemagne. Je lui donne quelques précisions sur notre attitude pacifique. Il me dit que si la Finlande subit actuellement le joug allemand, elle ne s’y résignera jamais.

Diamandy, ancien ministre de Roumanie à Pétrograd, m’apporte le texte complet du traité germano-roumain. Il me montre les clauses qui permettent à l’Allemagne et à l’Autriche d’intervenir dans les affaires intérieures de Roumanie, notamment dans le choix des livres de classe.

Le prince Albert de Monaco me rend visite à propos du traité entre la France et la principauté. Il m’avait écrit. Le prince me parle des dommages causés à son château de Marchais par les Allemands. Il me raconte qu’il y a quelques années, le roi d’Italie allant en Suède avec la reine, l’empereur, l’impératrice, le kronprinz et lui, se sont