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politique, plutôt que par les armes. Cela le regarde. »

Une fois encore, malgré mes efforts, Clemenceau prend son parti de cette inaction, comme s’il n’était pas fâché qu’il n’y eût de victoire que sur notre front. Puis, il en revient sur des questions de personnes, à ses boutades habituelles.

Le général Diaz vient me voir, petit homme, brun, l’air malin. Il m’assure qu’il serait tout disposé à attaquer, qu’il a préparé un plan ; mais s’il a les moyens de réussir dans l’attaque même, il n’a pas, prétend-il, ceux de résister à une contre-attaque ; il n’a plus dans les dépôts, en attendant la classe prochaine, que 50 000 hommes ; il dit ensuite : cinquante mille plus trente mille, qu’on a désembusqués, mais c’est tout ; et sans préciser autrement, il me laisse entendre qu’il faudrait des effectifs nouveaux, et il est visible qu’il est venu en France chercher des Américains.

Il ajoute que « les Autrichiens ne sont pas dans un état moral aussi mauvais que celui des Allemands », qu’ils « se battent admirablement, qu’il ne faut pas juger d’eux par les deux divisions que nous avons eues en face de nous sur notre front, ce sont des divisions fatiguées et, du reste, elles n’ont, en France, que des éléments, car elles ont encore été identifiées ces jours-ci en Italie. »

Le commandant Challe m’annonce que l’armée Debeney attaque demain. L’opération de Saint-Mihiel est maintenue. Mais, pour essayer de dépister les Allemands, on va envoyer à Belfort des états-majors d’armée.


Samedi 31 août.

Avec Albert Lebrun, visite à un certain nombre de communes libérées. Nous partons en auto à sept heures du matin et commençons par un arrêt à Compiègne, entièrement évacué et en grande