Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 10, 1933.djvu/69

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
64
LA VICTOIRE

d’un mois, il n’aura pas, dit-il, de quoi reconstituer les divisions engagées et il sera dans l’impossibilité de prendre la contre-offensive nécessaire pour soulager le front attaqué. Il tient à signaler ce gros risque. Il n’y aurait qu’un remède : l’arrivée rapide des Américains et l’amalgame. Mais jusqu’ici, il n’y a que cinq divisions américaines prêtes et Pershing continue à refuser l’amalgame des troupes combattantes ; il ne l’accepte que pour l’instruction.

Si les Allemands, par impossible, n’attaquaient pas cette année, Pétain ferait tous les deux mois des opérations analogues à celle de la Malmaison et ce serait toute la campagne de l’année. Tout cela est sombre. Pétain est maigri par la grippe. Je fais la part de son tempérament un peu pessimiste, mais la maladie s’y est ajoutée.

Le général Brugère m’amène le général américain Wood, ami de Roosevelt, qui a autrefois combattu aux Philippines et qui boite. Wood se dit entièrement d’accord avec Pétain sur la nécessité de l’amalgame. Il est, du reste, le rival de Pershing et songe, paraît-il, à le remplacer. Mais il est en disgrâce auprès de Wilson.