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LA VICTOIRE

aurions chance de tenir. » À quoi le général Duchesne a répondu : « Nous tiendrons quand même. » Mais c’est d’autre chose que je voulais vous parler, continue Clemenceau. Je ne me laisse pas démonter facilement. Il y a cependant des choses qui se passent et qui ne me plaisent pas. Clémentel et Loucheur se livrent à de petites intrigues. Klotz refuse de tenir les promesses qu’il a faites à Pams pour les préfets qui doivent être nommés trésoriers généraux, et il se fait interpeller par Grodet pour se retrancher derrière un vote parlementaire. Puis il se fâche avec Lémery et lui parle d’un ton inadmissible. Pour Loucheur, je suis ennuyé de le voir intriguer avec Clémentel, parce qu’il fait bien son affaire. Il neutralise Merrheim, il manœuvre habilement avec les ouvriers. Il me serait égal qu’il me critiquât, comme je sais qu’il le fait, mais il a des arrière-pensées. Il a pris le Pays avec quelques autres personnes. Il m’avait promis que cette feuille évoluerait. Mais elle n’évolue pas. Je sais bien qu’on devait admettre Thomas dans la combinaison. Il faut 2 000 francs par mois à Thomas pour lui donner un peu d’indépendance. C’était bien. Mais voici que le Pays oppose Thomas au cabinet et continue le feu contre nous. Je ne puis pas accepter cela. Si cela ne s’arrange pas, je vous remettrai ma démission pour que vous me rendiez ma liberté et je reconstituerai le cabinet. S’il le faut, je prendrai Péret à la place de Klotz. Quant à Loucheur, je lui dirai franchement qu’il se fait des illusions s’il s’imagine qu’il me succédera. »


Mardi 12 mars.

Alerte vers neuf heures du soir. Nous apprenons successivement que des bombes sont tombées au ministère de la Guerre et au Luxembourg. Vers minuit, l’alerte est terminée. Je recommence