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L’ESPACE ET SES TROIS DIMENSIONS

combien de dimensions elle nous ferait attribuer à l’espace. Je veux comparer les deux points occupés par A et B aux instants α et β, ou (ce qui revient au même puisque je suppose que mon doigt touche A à l’instant α et B à l’instant β) je veux comparer les deux points occupés par mon doigt aux deux instants α et β. Le seul moyen dont je dispose pour cette comparaison est la série Σ des sensations musculaires qui ont accompagné les mouvements de mon corps entre ces deux instants. Les diverses séries Σ imaginables forment évidemment un continu physique dont le nombre de dimensions est très grand. Convenons, comme je l’ai fait, de ne pas considérer comme distinctes les deux séries Σ et Σ + S + S' lorsque les deux séries S et S' seront inverses l’une de l’autre au sens donné plus haut à ce mot ; malgré cette convention, l’ensemble des séries Σ distinctes formera encore un continu physique et le nombre des dimensions sera moindre mais encore très grand.

À chacune de ces séries Σ correspond un point de l’espace ; à deux séries Σ et Σ' correspondront ainsi deux points M et M'. Les moyens dont nous disposons jusqu’ici nous permettent de reconnaître que M et M' ne sont pas distincts dans deux cas : 1o si Σ est identique à Σ' ; 2o si Σ' = Σ + S + S', S et S' étant inverses l’une de l’autre. Si, dans tous les autres cas, nous regardions M et M' comme