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LA VALEUR DE LA SCIENCE

sciences exactes et des sciences physiques, et même il a fait preuve de précieuses facultés d’invention mathématique.

Résumons en quelques mots sa doctrine qui a donné lieu à de nombreuses discussions.

La Science n’est faite que de conventions, et c’est uniquement à cette circonstance qu’elle doit son apparente certitude ; les faits scientifiques, et à fortiori, les lois sont l’œuvre artificielle du savant ; la science ne peut donc rien nous apprendre de la vérité, elle ne peut nous servir que de règle d’action.

On reconnaît là la théorie philosophique connue sous le nom de nominalisme ; tout n’est pas faux dans cette théorie ; il faut lui réserver son légitime domaine, mais il ne faudrait pas non plus l’en laisser sortir.

Ce n’est pas tout, la doctrine de M. Le Roy n’est pas seulement nominaliste ; elle a encore un autre caractère qu’elle doit sans doute à l’influence de M. Bergson, elle est anti-intellectualiste. Pour M. Le Roy, l’intelligence déforme tout ce qu’elle touche, et cela est plus vrai encore de son instrument nécessaire « le discours ». Il n’y a de réalité que dans nos impressions fugitives et changeantes, et cette réalité même, dès qu’on la touche, s’évanouit.

Et cependant, M. Le Roy n’est pas un sceptique ;