Page:Poincaré - Science et méthode (Édition définitive).djvu/116

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Quiconque parle de l’espace absolu, emploie un mot vide de sens. C’est là une vérité qui a été proclamée depuis longtemps par tous ceux qui ont réfléchi à la question, mais qu’on est trop souvent porté à oublier.

Je suis en un point déterminé de Paris, place du Panthéon, par exemple, et je dis : je reviendrai ici demain. Si l’on me demande : Entendez-vous que vous reviendrez au même point de l’espace ; je serai tenté de répondre : Oui ; et cependant j’aurai tort, puisque d’ici à demain la Terre aura marché, entraînant avec elle la place du Panthéon, qui aura parcouru plus de 2 millions de kilomètres. Et, si je voulais préciser mon langage, je n’y gagnerais rien, puisque ces 2 millions de kilomètres, notre globe les a parcourus dans son mouvement par rapport au soleil, que le soleil se déplace à son tour par rapport à la Voie Lactée, que la Voie Lactée elle-même est sans doute en mouvement sans que nous puissions connaître sa vitesse. De sorte que nous ignorons complètement et que nous ignorerons toujours de combien la place du Panthéon se déplace en un jour. En somme, j’ai voulu dire : Demain je verrai de nouveau le dôme et le fronton du Panthéon, et s’il n’y avait pas de Panthéon, ma phrase n’aurait aucun sens et l’espace s’évanouirait.

C’est là une des formes les plus banales du principe de la relativité de l’espace ; mais il en est une autre, sur laquelle Delbeuf a particulièrement