Page:Poincaré - Science et méthode (Édition définitive).djvu/33

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portrait et lui donnent le caractère et la vie. Et il n’y a pas à craindre que cette préoccupation instinctive et inavouée détourne le savant de la recherche de la vérité. On peut rêver un monde harmonieux, combien le monde réel le laissera loin derrière lui ; les plus grands artistes qui furent jamais, les Grecs, s’étaient construit un ciel ; qu’il est mesquin auprès du vrai ciel, du nôtre.

Et c’est parce que la simplicité, parce que la grandeur est belle, que nous rechercherons de préférence les faits simples et les faits grandioses, que nous nous complairons tantôt à suivre la course gigantesque des astres, tantôt à scruter avec le microscope cette prodigieuse petitesse qui est aussi une grandeur, tantôt à rechercher dans les temps géologiques les traces d’un passé qui nous attire parce qu’il est lointain.

Et l’on voit que le souci du beau nous conduit aux mêmes choix que celui de l’utile. Et c’est ainsi également que cette économie de pensée, cette économie d’effort, qui est d’après Mach la tendance constante de la science, est une source de beauté en même temps qu’un avantage pratique. Les édifices que nous admirons sont ceux où l’architecte a su proportionner les moyens au but, et où les colonnes semblent porter sans effort et allègrement le poids qu’on leur a imposé, comme les gracieuses cariatides de l’Erechtheion.

D’où vient cette concordance ? Est-ce simplement