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Page:Poincaré - Science et méthode (Édition définitive).djvu/40

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tant qu’elle est isolée, est absolument dépourvue de valeur ; nous nous sommes souvent donné beaucoup de peine pour la construire, mais cela ne sert absolument à rien, si ce n’est peut-être à donner un sujet de devoir pour l’enseignement secondaire. Il en sera tout autrement le jour où cette combinaison prendra place dans une classe de combinaisons analogues et où nous aurons remarqué cette analogie ; nous ne serons plus en présence d’un fait, mais d’une loi. Et, ce jour-là, le véritable inventeur, ce ne sera pas l’ouvrier qui aura patiemment édifié quelques unes de ces combinaisons, ce sera celui qui aura mis en évidence leur parenté. Le premier n’aura vu que le fait brut, l’autre seul aura senti l’âme du fait. Souvent, pour affirmer cette parenté, il lui aura suffi d’inventer un mot nouveau, et ce mot aura été créateur ; l’histoire de la science nous fournirait une foule d’exemples qui sont familiers à tous.

Le célèbre philosophe viennois Mach a dit que le rôle de la Science est de produire l’économie de pensée, de même que la machine produit l’économie d’effort. Et cela est très juste. Le sauvage calcule avec ses doigts ou en assemblant de petits cailloux. En apprenant aux enfants la table de multiplication, nous leur épargnons pour plus tard d’innombrables manœuvres de cailloux. Quelqu’un autrefois a reconnu, avec des cailloux ou autrement, que 6 fois 7 font 42 et il a eu l’idée de noter le résultat,