Page:Poincaré - Science et méthode (Édition définitive).djvu/62

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

car, quand on consulte le suffrage universel, on ne peut se flatter de réunir l’unanimité.

Un premier fait doit nous étonner, ou plutôt devrait nous étonner, si nous n’y étions si habitués. Comment se fait-il qu’il y ait des gens qui ne comprennent pas les Mathématiques ? Si les Mathématiques n’invoquent que les règles de la Logique, celles qui sont acceptées par tous les esprits bien faits, si leur évidence est fondée sur des principes qui sont communs à tous les hommes et que nul ne saurait nier sans être fou, comment se fait-il qu’il y ait tant de personnes qui y soient totalement réfractaires ?

Que tout le monde ne soit pas capable d’invention, cela n’a rien de mystérieux. Que tout le monde ne puisse retenir une démonstration qu’il a apprise autrefois, passe encore. Mais que tout le monde ne puisse pas comprendre un raisonnement mathématique au moment où on le lui expose, voilà qui paraît bien surprenant quand on y réfléchit. Et pourtant ceux qui ne peuvent suivre ce raisonnement qu’avec peine sont en majorité ; cela est incontestable, et l’expérience des maîtres de l’enseignement secondaire ne me contredira certes pas.

Et il y a plus ; comment l’erreur est-elle possible en Mathématiques ? Une intelligence saine ne doit pas commettre de faute de logique, et cependant il y a des esprits très fins, qui ne broncheront pas dans un raisonnement court tel que ceux que l’on a à