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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/129

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XI
indignation et enthousiasmes

La nouvelle apportée par les éclaireurs indiens, sans être tout à fait inattendue, causa pourtant une certaine émotion dans le village Métis.

Le gué de Gabriel’s Crossing, où la présence des troupes anglo-canadiennes venait d’être signalée, est, en effet, situé un peu au nord de Clark’s Crossing, à huit milles seulement de Batoche, et l’on calculait qu’une petite journée de marche suffirait à la colonne ennemie pour gagner ce dernier point. Mais ce qui surexcitait surtout les esprits, c’était l’idée que la vraie campagne commençait et qu’à la lutte contre la police du territoire allait succéder, plus acharnée et plus décisive, la guerre aux forces envoyées par le Gouvernement, commandées par un major général, appuyées de canons.

Pierre La Ronde n’avait trouvé chez lui que sa mère et ses sœurs et, les laissant à l’émotion de la grave nouvelle, il était redescendu vers la rivière, où son père et ses frères, mêlés à d’autres Métis, achevaient la fortification du gué. Mais, au moment où il allait entrer dans les bois qui bordent l’eau, le jeune homme s’arrêta. Cette silhouette qui, là-bas, contournait la « fence » de la maison des prisonniers n’était-elle pas celle de son cadet ? N’était-ce pas encore lui qui, sans doute, allait comploter quelque traîtrise avec ses amis les An-