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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/144

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le combat de fish-creek

le côté, faisant tous ses efforts pour se relever, et, au-dessous d’eux, dans une brume bleuâtre de poudre, un grand remous d’hommes oscillants. Plus de doute, le désordre se mettait dans les rangs, et le mouvement de recul se dessinait, très net.

En deux mots, Edward fut près de Charlie :

— Blessé ?

— Non… presque rien. Simple écorchure… Une balle dans le mollet droit.

Le sang coulait assez abondamment à travers la jambière déchirée de l’officier et rougissait la terre.

— Par le ciel ! s’exclama Edward. Il faut nous tirer d’ici… Attendez, je vais vous porter.

Les balles, autour d’eux, passaient avec leur petit sifflement sinistre :

— Mais vous allez vous faire faucher, Simpson ! Aidez-moi vite à me transporter derrière ce tronc… Une fois abrités là, nous pourrons demander de l’aide…

Le tronc géant d’un bouleau renversé s’arrondissait, en effet, à quelques pas d’eux. Quand Went fut étendu derrière, Edward, en sécurité désormais, appela avec force gestes un sergent de carabiniers qui tiraillait bravement à quinze mètres de là, cramponné au terrain conquis. Au même instant, une voix se faisait entendre au-dessus de la tête des deux officiers tapis le long de l’arbre :

— Lieutenant Clamorgan !

Avec un saisissement inexprimable, ils reconnurent la figure ambrée de Jean La Ronde penchée sur eux.