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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/245

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les arpents de neige

deux pour se glisser jusqu’à la lisière et constater si notre drapeau flotte toujours là-haut… Si oui, on avisera sitôt après.

— Ta blessure est encore trop fraîche, observa François à Jean, qui parlait de se proposer. Tu comprends : faut un homme qui ait bon pied, bon œil…

À ce moment arrivaient Pierre et Vallonges avec une couverture pleine de paquets de cartouches :

— Je me charge de l’affaire, déclara l’aîné des fils La Ronde, dès que Dumont l’eut mis au courant de la situation. Durant ce temps, que deux ou trois de vous autres descendent à la rivière avec M’sieu le vicomte, j’avons ramené un canot plein de munitions.

Ce disant, il s’assurait que sa hachette et ses revolvers étaient bien en place ; après quoi, il adressa un petit signe à Dumont et aux siens et disparut derrière les halliers.

Son absence dura une vingtaine de minutes environ. Quand il revint, la joie brillait dans ses yeux sombres :

— Le drapeau est là-haut ! s’écria-t-il avec émoi. Ils n’y ont pas touché !

Un joyeux hourra, dont l’ennemi dut s’étonner, courut avec cette nouvelle de tranchée en tranchée, d’un bout à l’autre des positions métisses.

— Frères ! dit d’une voix vibrante Louis Riel qui s’était avancé, le Très-Haut visiblement nous protège, puisqu’il permet que notre drapeau flotte encore sur l’église Saint-Laurent… Continuez donc de vous défendre avec l’énergie dont vous avez fait preuve jusqu’à cette heure. Nous ne pouvons guère