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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/92

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anglaise et bois-brûlé

Et, comme miss Clamorgan souriait plus nettement, il questionna :

— Ni vous non plus ?

La jeune fille inclina la tête. Le père continua :

— J’ai réfléchi à nos dernières aventures, Elsie, et maintenant j’incline à penser que vous possédez une réelle influence sur ce jeune homme…

Comme elle se taisait, il reprit :

— C’est à cause de vous, évidemment, qu’il s’est montré si dévoué pour nous au Fort-Pitt. Cela m’avait d’abord échappé… Mais je vois clairement maintenant, et nous serions bien sots, en vérité, de ne pas essayer, à la première occasion, de tirer parti de ses bonnes dispositions.

Miss Clamorgan, qui surveillait des yeux la silhouette de l’homme, avança vivement la main :

— Reculez-vous, mon père, il est inutile qu’il vous aperçoive.

Ils ne s’étaient pas trompés. C’était bien, en effet, Jean La Ronde qui se glissait ainsi au crépuscule sous le couvert des bouleaux en lançant des coups d’œil furtifs vers la maison où il savait la jeune Anglaise enfermée.

Cette grande bâtisse contenant une douzaine de prisonniers, dont trois femmes, les membres du Gouvernement provincial et l’agent des affaires indiennes, était située à l’une des extrémités de Batoche, dans la partie ouest du village, à l’orée du bois qui descend à la rivière.

Chaque matin et chaque soir, un Métis venait apporter aux captifs leur nourriture, composée généralement de conserves, de pemmican, quelque-